Depuis l’affaire Dreyfus on nous a appris que l’innocence ou la culpabilité d'un suspect se décident devant un tribunal, pas dans les tribunes d’opinion ou les salons aristocratiques –fussent-ils artistiques.
Samantha Gailey, 13 ans, porte plainte contre Polanski, en mars 1977, après avoir été « droguée, violée, sodomisée » durant une séance photo. Polanski est accusé de « relations sexuelles illégales avec une mineure ». Il est libéré sous caution, et accepte de plaider coupable après accord entre son avocat et le juge. Incarcéré durant quarante-sept jours en Californie, Polanski passe des expertises psychiatriques. Libéré sous caution et en attente du verdict, Polanski quitte les Etats-Unis, et le juge émet un mandat d'arrêt toujours en vigueur jusqu'à son arrestation. La « victime », aujourd'hui agée de 45 ans, bénéficiaire d'un accord financier avec la partie adverse dont le montant demeure secret, ne souhaite plus de poursuites à l'encontre de Roman Polanski. Entre temps, Polanski a fait de très bons films. Tant mieux pour lui, car à écouter ses défenseurs, ça le dédouane méchamment ! Le milieu des Artistes, Mitterrand en tête, vole à son secours, s'indigne : « de la même manière qu'il y a une Amérique généreuse que nous aimons, il y aussi une certaine Amérique qui fait peur, et c'est cette Amérique-là qui vient de nous présenter son visage. », pour d'autres « c'était il y a 30 ans, il y a prescription », arguant à nouveau la qualité de l'œuvre artistique de Polanski...
Bref, on a là une présomption d'innocence quand ça arrange, le talent au-dessus de la justice, des arrestations banales et d'autres qui choquent, une fuite excusée, la sacro-sainte prescription et le fric qui effacent tout. Monsieur Polanski, si vous êtes innocent, défendez-vous sans fuir. La « justice » française vous dirait que la fuite est un aveu de culpabilité...
Une chose me tracasse : pourquoi un groupe de soussignés artistes qualifie son arrestation de « piège policier ». Or, d’après la presse suisse, ce serait le cinéaste qui a donné l’alarme lui-même en demandant à la police suisse une protection, attirant ainsi l’attention des autorités sur sa venue : elles ont constaté que ce monsieur était l’objet d’un mandat d’arrêt international émis en 2005. Polanski savait très bien qu’aux États-Unis le mandat d’arrêt demeurait en vigueur (ou était renouvellé périodiquement) et c’est pour cette raison qu’il évitait le pays. L’histoire est vieille de 30 ans? D'accord. Il est déjà un vieillard? D'accord. Et alors? Si l'affaire a prescrit, rien ne se passe. Si elle n’a pas prescrit, alors quelque chose de désagréable risque d’arriver à Polanski. Pas de chance.
Peut-être qu’à l’avenir, le siècle prochain, le fait de bondir sur une mineure de 13 ans ne sera plus considéré délit et que l’affaire Polanski sera assimilée à celle d'Oscar Wilde, qui a pourri en prison pour son homosexualité –et parce qu’il ne l’a pas cachée. C'est possible. J'espère que non. J'espère que le droit et la morale continueront à faire la distinction entre enfants et adultes, de façon à ce que ces derniers ne puissent en aucun cas abuser des premiers.
Peu importe que la victime présumée ait retiré sa plainte –tout comme le consentement que certains lui supposent ou son ivresse présumée. S’il s’agit de trouver des excuses, tous les pédophiles en ont une. Et pourtant, personne n’ose signer une pétition en leur défense.
Sources : Journal d'un avocat et Dessin de presse Large.
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