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Allégresses révolutionnaires

Le Tiers Monde est une interminable collection de gens délaissés par leurs dirigeants, généralement des dictateurs d'intensité différente. Lorsque ces populations prosternées estiment que l'assassinat officiel perd son pouvoir de coercition, quelques unes se rebellent. Fatigués de n'être que des pièces misérables d’un échiquier délabré, les pions défient ceux qui les sacrifiaient dans l’indifférence pour sauver le roi. Il s'agit d'un mécanisme de légitime défense collective aussi vieux que le fait de respirer.

Quelque chose de semblable est en train de se produire dans le monde arabe, une vaste région où près de 70% de la population a moins de 30 ans, pas ou peu d'espoir dans l'avenir et un revenu moyen aussi faible que mal distribué. L'Ouest accueille toujours avec une sympathie innocente les révolutions de toute couleur et odeur. Que ce soit l’orange ukrainienne, la rose géorgienne ou le jasmin tunisien (à ce jour j’ignore l’arôme de la révolte égyptienne). Rappelez-vous le monde occidental qui sautait de joie lorsqu’en 1979 l'imam Khomeiny, escorté par des laïcs, renversait le Shah pour établir un régime théocratique en Iran. Et puis, réaliser des approximations intellectuellement touristiques sur des enfers socialement complexes est une frivolité à la portée de beaucoup. Croire que Twitter, Facebook ou tout réseau social contribue péremptoirement à la chute d'un général sied bien chez Whiskypedia bien sûr, mais c’est un argument boiteux dans un monde où presque rien ne se passe par hasard séraphique.

D’autre part, quand un pharaon est embaumé en vie et qu’il acquiert le statut de momie exilée jaillissent toujours des messies en gros. Cela arrive dans le delta du Nil comme dans le delta du Rhône. Des personnages qui ont tiré des ficelles des protestations en apparence spontanées ou qui sont en mesure de capitaliser la colère. Ce sont les grands perturbateurs de la volonté majoritaire qu’est la foule laissée pour compte. En architecture on appelle cela un ‘trompe l'œil’.

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